Que pensent les labels du Nutri-Score ?

Depuis sa création en 2014, le Nutriscore a subi d’innombrables critiques provenant de certains industriels de l’agroalimentaire et groupements politiques. Les uns veulent empêcher la généralisation de ce logo sur l’ensemble des produits alimentaires tandis que d’autres souhaitent créer leur propre label.

Nutriscore maudit par les labels

Durant quatre ans, ces groupes industriels ont mis au point des stratégies visant à retarder, voire empêcher l’application de Nutriscore. Ces entreprises se plaignent de son caractère trop simpliste, factice et incomplet.

Pour y remédier, ils ont proposé des labels alternatifs pour entrer en concurrence avec Nutriscore. Ces groupes ont ensuite poussé plus loin la bataille en introduisant le sujet sur le plan politique pendant les élections parlementaires. Ils remettent en question la pertinence du mode de calcul pour évaluer la qualité nutritionnelle de différents aliments.

Malgré tout, en octobre 2017, la France a adopté Nutriscore. Et selon le règlement européen, son application sur les étiquettes des marchandises alimentaires était facultative au début. Plus tôt en 2014, lors de sa première présentation aux entreprises, aucune n’a accepté de l’afficher sur son produit. Et à la sortie de l’arrêté en octobre 2017, 600 entreprises ont accepté l’affichage sur leur étiquette.

Mais les grandes multinationales agroalimentaires comme Coca-Cola, Mars, Ferrero, Mondelez, Lactalis, Unilever, Kraft, refusent encore de l’adopter. Dans la communauté européenne, l’opposition à Nutriscore en tant que logo unique et obligatoire réunit encore beaucoup de partisans.

Dans de nombreux pays comme l’Italie, l’Espagne, la France, des actions contre le Nutriscore ont vu le jour. Des opérateurs économiques et des politiciens commencent à montrer leur intérêt pour la lutte contre la généralisation de ce logo. Les secteurs agricoles s’y engagent pour contester le fait de le rendre obligatoire.

L’opposition au Nutriscore au nom de la préservation de la tradition

Les industriels de l’agroalimentaire qui s’opposent au Nutriscore appartiennent surtout à la filière charcuterie et fromagerie. Ils pensent qu’ils sont mal classés par Nutriscore. Ils se considèrent comme victimes d’une injustice.

La plupart des produits charcutiers et fromagers sont classés D et E ? Selon ces producteurs, ces notations sont impertinentes. Elles sont arbitraires, car le fromage ne devrait pas être évalué sur la base de 100 grammes par jour, mais de 30 grammes par jour (ce qui doit être la quantité journalière de fromage consommé par une personne).

Le Nutriscore négligerait également l’apport en calcium des produits laitiers. Ainsi, seul le gras est pris en compte au détriment des nutriments qui font l’utilité de ces produits. Le degré de transformation est également négligé. Ainsi le fromage dont les ingrédients sont totalement naturels et simples se trouve surclassé par des produits ultra-transformés contenant un très grand nombre d’additifs.

Les agriculteurs espagnols et italiens affirment que Nutriscore prend en otage l’alimentation méditerranéenne. Car la mauvaise notation des fromages et des produits de la charcuterie attaque directement la base de la tradition culinaire méditerranéenne.

Les lobbys agricoles de ces agriculteurs et politiciens anti Nutriscore se basent donc sur l’argument de la défense de la tradition culinaire méditerranéenne. Cette dernière fait partie selon eux d’un patrimoine culinaire régional et national.

Ces producteurs prônent la création de labels de qualité plus compatibles avec les aliments traditionnels. Parmi ces derniers, citons l’AOC/AOP, l’IGP, le label bio, le Label rouge, etc. Ces labels de qualité assurent la garantie de l’origine d’un produit alimentaire. Ils certifient également le terroir et le savoir-faire utilisé pour sa fabrication.

Ces appellations et ces labels permettent d’apprécier les vraies valeurs d’un produit alimentaire en termes de mode de production et de terroir. Ce sont des informations qu’il faut fournir aux consommateurs.

La création de nouveaux modes de classements

Les producteurs d’aliments mal classés par le Nutriscore proposent la création d’un nouveau mode de notation. Ainsi de nombreux labels et systèmes de classement ont vu le jour.

Il faut tenir compte du degré de transformation et des additifs. La start-up Siga considère que la perspective de Nutriscore sur la notion d’aliment sain est biaisée. En effet, elle ne prend pas en considération le degré de transformation d’un produit. Pourtant, c’est un facteur de détérioration de la qualité nutritionnelle d'un aliment.

Les ingrédients comme le sucre et la matière grasse ne sont pas mauvais en soi. C’est leur mode de consommation qui les rend nocifs ou bons pour la santé. Par contre, le degré avancé de transformation et l’utilisation d’additifs sont toujours nocifs. Selon Anthony Fardet, le chercheur de l’Inrae (l’Institut national de Recherche pour l’Agriculture, l’Alimentation et l’Environnement) à l’origine de Siga. Il affirme que le fait de remplacer un soda trop sucré par un soda light ne changera rien.

L’apparition des étiquettes environnementales

Des labels qui se basent sur des notations basées sur l’environnement ont aussi fait leur apparition. C’est par exemple le cas du label Eco-Score, le Planet-Score, La Note globale.

La création de ces étiquettes environnementales répond à l’appel à projets du Ministère de la transition écologique et de l’Ademe. Les lois sur le climat stipulent que ces scores doivent être obligatoires après avoir été testés.

Ainsi, les acteurs comme Yuka ont Marmiton et Open Food Facts ont créé l’Eco-Score. Ce dernier se base sur le circuit des produits. L’Itab (l’Institut de l’agriculture et de l’alimentation biologique) a créé Planet-Score. Il prend comme paramètre des indicateurs comme l’usage des pesticides, la conséquence de la manière dont l’animal a été élevé sur son bien-être. Certaines étiquettes attribuent les points en relatifs à la contribution du produit à l’économie nationale ainsi que de la responsabilité sociale de l’entreprise.

Une diversité de labels et de systèmes de notation qui sème la zizanie

Ces différents systèmes de notation et ces labels divers n’utilisent pas les mêmes systèmes. On assiste à une création presque dégradée et improvisée de critères de notation. Certains sont presque improbables, comme la notation « sans nitrite », ou « fabriquée en France ».

Par conséquent, les consommateurs sont complètement désorientés. Ils déplorent ces foisonnements d’informations sur les emballages des produits alimentaires à l’étalage. L’analyste, Frédéric Nicolas, pense que les dirigeants devraient trouver une solution. Une réglementation rigoureuse est requise. Il ne faut plus laisser l’industriel alimentaire se charger de la création de ces systèmes.

En somme, le logo Nutriscore veut faciliter la vie des consommateurs. Il rend plus accessible l’interprétation des informations nutritionnelles sur les emballages. Toutefois, certains producteurs de denrées alimentaires se sentent exclus de la sphère commerciale quand l’État a rendu obligatoire son impression sur toutes les étiquettes. Cela a engendré une vague de critiques, de protestations et de mesures de riposte : la naissance de plusieurs labels contre le Nutriscore.